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Date de publication
23.03.2020
Auteur
P. Joachim Moernaut FSO

Corona et saint Joseph

La situation actuelle dans le monde me presse de partager avec vous quelques réflexions sur le rôle de saint Joseph comme protecteur de nos foyers.

Dans l'Evangile de ce jour, nous trouvons trois dispositions de son cœur, qui pourraient nous aider à surmonter la crise actuelle.

Penser aux autres

1) Dans la tribulation que la grossesse de Marie portait avec, il ne s'est pas replié sur soi-même, même s'il avait eu tout le droit. Sa future épouse était enceinte, un rêve pour lui tombait en ruines et nous pouvons nous imaginer sa désillusion et sa perplexité.

Mais au lieu de faire valoir ses droits, de se replier sur soi-même et de se protéger contre les mauvaises langues, il a regardé Marie avec amour et l'a protégée. Il voulait se séparer d'elle sans la dénoncer publiquement. Quel homme, quel courage ! Au lieu de sauver sa propre peau dans cette situation précaire, il ne pensait qu'à l'épouse qu'il aimait.

La maladie qui ravage notre monde, ferme les frontières, met les personnes en quarantaine, les isoles des autres. L'hystérie et la panique nous font souvent penser uniquement à nous-mêmes, nous renferment dans nos zones de confort et nous poussent à sauver d'abord notre propre peau. Mais regardons saint-Joseph et apprenons de lui que c'est maintenant le moment favorable pour nous occuper des autres, soutenir les plus faibles, les plus fragiles. Le temps que l'on passe enfermé à la maison est le temps par excellence pour sortir de nos égoïsmes et ouvrir notre cœur à ceux qui ont plus besoin de notre charité : les personnes âgées qui se retrouvent seules, les gens qui n'ont plus de travail, ceux qui sont déboussolés par la situation et la peur. Si nous devons quand-même rester en quarantaine ou en isolement et éviter tout contact physique avec les autres, ne le faisons pas tout court pour nous protéger, mais surtout par amour pour ceux qui sont plus fragiles. Rapprochons-nous encore plus des autres par la prière, nos paroles et nos signes de charité. Pensons spécialement aussi à tous ceux qui ont la tâche d'assister les malades : les médecins et les infirmières qui travaillent jour et nuit.

Rêver

2) St Joseph n'avait pas seulement un regard vers les autres, il était aussi toute oreille pour Dieu. Il était l'homme du silence, de l'écoute, toujours sensible à ce que Dieu lui demandait. L'Evangile nous raconte que Joseph était visité par l'ange dans un songe. Cela peut être un peu bizarre pour nous, parce que dans la pensée de notre époque, tout ce qui n'est pas visible, tout ce qu'on ne peut pas toucher et prendre en main doit être illusoire. Il n'y a qu'un seul monde réel pour les gens de notre époque: c'est le monde matériel, la réalité de nos actions et notre performance. Mais l'Evangile nous montre que saint Joseph était ouvert à une autre réalité: la réalité de la volonté de Dieu qui se manifeste.

Ayons aussi le courage de "rêver". J'utilise ce mot non pas dans le sens péjoratif qu'il pourrait avoir aujourd'hui, mais dans son sens biblique: l'ouverture à la dimension surnaturelle qui était propre à Abraham quand il voyait le feu dans le sacrifice, à Jacob, quand il voyait l'échelle et les anges descendre du ciel et à cet autre Joseph, qui était appelé un "rêveur" par ses frères. Leurs rêves étaient expression de la sagesse, par laquelle ils savaient interpréter les événements de leurs jours dans la lumière de Dieu.

C'est la façon dans laquelle nous devons regarder l'histoire de nos jours : qu'est-ce que Dieu nous veut dire avec tout cela ? Quel est son plan d'amour qui se dévoile au-delà de cette misère ? Il me semble que ce n'est pas un hasard que le virus se soit manifesté dans nos pays au début du carême. "Carême" et "quarantaine" sont deux mots qui ont la même étymologie. Il y a une centaine d'années, les gens qui visitaient un autre pays, devaient rester une certaine période (à l'origine quarante jours) à l'écart, avant de pouvoir entrer. Il n'y avait pas encore des médicaments pour toute maladie et un virus d'un pays étranger aurait pu exterminer une ville entière. C'est une réalité qu'aujourd'hui, nous avons oubliée. Il nous semble que l'homme l'ait presque emporté sur la mort, qu'il y ait une solution contre toute sorte de mal.

Mais un petit virus corona a rappelé l'homme "qu'il n'est que poussière et qu'à la poussière il retournera". Le virus ne vient pas de Dieu. Le Seigneur est un Dieu de la vie, Il ne veut pas le mal pour sa création. Mais par une chose tellement petite, il nous fait comprendre comment nous sommes fragiles et faibles, quelle distance nous tient encore éloignés de nos faux rêves de vaincre tout le mal du monde par nos propres forces. La quarantaine dans laquelle le monde entier se trouve, nous fait comprendre que le paradis que Dieu nous a ouvert n'est pas ici sur terre. Nous vivons un Carême global, qui nous invite à regarder vers la croix et la Résurrection comme uniques sources du salut. Ce n'est pas l'homme qui va vaincre la mort, c'est Jésus, qui l'a déjà vaincue et qui nous veut faire participer à sa victoire. Ouvrons donc nos yeux pour le point de vue de Dieu, pour la réalité de sa croix. Soyons rêveurs comme Joseph.

Action

3) À la fin de l'Evangile, on dit de saint Joseph, qu'il faisait exactement comment l'ange lui avait dit. Saint Joseph est un homme des actes. Dans le Nouveau Testament, il n'y a aucune parole qu'il prononce. La seule chose que nous savons de lui est ce qu'il a fait. Pour venir à la lumière, pour être sauvé, nous dit Jésus, il ne suffit pas de connaître la vérité. "Celui qui FAIT la vérité vient à la lumière".

Saint Joseph est l'homme de l'action, de l'obéissance concrète à la volonté divine. Il nous enseigne à ne pas perdre trop de paroles, mais de vivre concrètement la foi.

Aujourd'hui, les médias, la radio, l'Internet, la télé,... sont pleins de messages concernant le virus. Partout, on en parle. La sensibilisation est bonne, mais en parler uniquement fait seulement monter la peur et le désespoir. Regardons donc vers saint Joseph: homme de peu de paroles, mais de grands actes. Nous aussi, évitons les bavardages inutiles sur le thème qui font monter seulement la pression du sang. Soyons des femmes et des hommes de l'espérance ! Montrons par notre façon de vivre que nous prenons au sérieux les dangers de cette maladie, mais qu'elle n'a pas le dernier mot. Ne nous laissons pas paralyser par la peur. Ne perdons pas ces semaines par des passe-temps futiles, mais utilisons le temps qui nous est donné chez nous pour intensifier les liens dans la famille, pour grandir dans la prière, réconforter les plus faibles par un simple coup de téléphone ou un geste de charité. En tout, rendons témoignage de l'espoir qui nous habite !